Les maths : une haine justifiée ?
On pourrait dire que notre capacité à faire des choix sensés, objectifs, ainsi qu’informés, se développe au cours de notre vie et nécessite une certaine maturité. Pourtant, paradoxalement, les décisions les plus importantes de notre vie, nous les faisons quand nous sommes encore mineur.e.s : quelle université choisir ? Quel métier ? Et si on remonte un peu plus, quelles options ? Une langue 4, mathématiques approfondies, études classiques… Peu importe la direction que l’on prend, on distingue toujours deux groupes, tout se réduit à cette division entre les élèves : les humanistes et les scientifiques. Avec ce dernier groupe, on sous-entend souvent une autre matière, sur laquelle il est dur de poser un avis tranché tellement elle fait débat : les mathématiques. N’est-ce pas curieux de voir qu’une partie des élèves est prête à faire des maths huit heures par semaines et à participer à des olympiades autour de cette discipline, alors qu’une autre partie tremble de peur dès qu’on dit le mot « équation » ? Est-ce qu’il y a vraiment des personnes « nulles » et des personnes « fortes » en maths ?
Olympiade Mathématique Belge – Un évènement qui révèle certaines mécaniques
Commençons déjà par voir ce qu’est une Olympiade. On pourrait dire que c’est un concours, une compétition, pour voir qui est le meilleur dans cette matière à un niveau national. Il y a une part de vérité dans cela, on cherche en effet à évaluer nos capacités de calcul mental, de réflexion, dans un temps limité, comme un examen, et à obtenir le meilleur score possible pour aller à l’étape d’après. Toutefois, une Olympiade, c’est bien plus que cela.
Tout d’abord, il ne suffit pas de savoir réaliser quelques calculs pour passer à la demi-finale. Le questionnaire est fait d’une telle manière qu’il implique une certaine stratégie. De fait, pour une question réussie, on reçoit cinq points, pour une abstention, deux, et pour une mauvaise réponse, rien ! On pourrait alors se dire : « C’est simple, je ne vais que m’abstenir. », mais que nenni, il y a bien un minimum de questions auxquelles il faut répondre pour que notre copie soit prise en compte. Ces mathématiciens ont donc pensé à tout : il faut être sûr.e de sa réponse et ne pas répondre au hasard, puisqu’une bonne réponse, il n’y en a qu’une, et des mauvaises, il y en a pas mal.
Rassurez-vous, la série de trente exercices de la phase éliminatoire de l’Olympiade Mathématique Belge n’a pas pour but de nous déstabiliser ou de nous rabaisser. L’objectif est de nous confronter à une nouvelle manière de penser. Les exercices du début ne sont pas bien durs : rapides et efficaces, ils visent à nous mettre dans un état d’esprit logique. Les exercices qui suivent sont plus complexes et semblent incompréhensibles après une première lecture. Il est vrai que là, le but est de nous emmêler, nous faire perdre nos repères. Les mathématiques ont en effet cette grande qualité d’inter-corrélation : on trouve rarement un exercice concret où il suffit d’utiliser un seul théorème. D’habitude, on doit mobiliser tout ce que l’on sait et le mettre à notre profit : car même s’il y a une seule solution, les chemins pour y arriver sont multiples. Ainsi, il ne faut point se laisser impressionner. Il faut décomposer l’énoncé, trouver des indices qui nous conduisent vers un raisonnement et surtout, comprendre ce que l’on cherche. La réponse est souvent juste devant notre nez.
Les maths – une source d’anxiété ?
Malgré la bouffée de satisfaction que nous apporte la résolution d’un exercice assez complexe de l’Olympiade, on s’est tous déjà sentis oppressés et perdus dans ce monde de chiffres qui est bien trop grand pour la petitesse de notre esprit. Certains disent même que les mathématiques sont une source d’anxiété, et cela peut être compréhensible. Le fait de ne pas comprendre, peu importe la manière dont on nous le formule, est certainement l’une des choses les plus frustrantes. Cette peur des maths n’est pas qu’une invention des élèves qui ne veulent pas faire leurs devoirs, cela fait déjà quelque temps que les scientifiques parlent d’une “arithmophobie”. L’anxiété que déclencherait cette matière pourrait mener à d’intenses migraines et à des douleurs musculaires, mais pourquoi ?
Tout d’abord, la mathématique, comme les chiffres qu’elle gouverne, est infinie. Elle évolue tout le temps. On part des nombres entiers pour atteindre les irrationnels dans nos premières années de secondaire, pour réaliser que, finalement, x² peut être égal à -1 dans les nombres complexes et que 1=0 n’est pas si absurde que cela. Les maths sont vraiment une langue, avec ses propres conjugaisons et exceptions. On l’utilise aussi pour communiquer, mais cette fois, ce qu’on partage, ce n’est pas un ressenti ou un besoin, c’est notre logique, et c’est cette logique qui fait débat, car quand on ne parle pas une langue, il est normal qu’on soit stressés.
En effet, certains disent qu’ils n’ont aucune logique. On se sent nuls quand on ne comprend rien à un exercice que toute notre classe fait en deux minutes. Nombreux sont ceux qui ont déjà souffert pour résoudre des problèmes. C’est pour cela que certains abandonnent les mathématiques dès qu’ils le peuvent, réduisent le nombre de périodes consacrées à cette matière et trouvent leur propre voie, qui leur procure du plaisir, autre part. Mais est-ce qu’on peut vraiment échapper aux maths ? Les réduire à un mauvais souvenir et passer à autre chose ?
Au fait, c’est quoi les maths ?
Il est difficile de trouver une définition des mathématiques. Certains disent que ce sont des calculs qui résolvent un problème, d’autres que c’est un ensemble de règles qui tournent autour des chiffres. Ce ne sont pourtant que des généralisations. On pourrait dire que les sciences essayent de répondre à la question “pourquoi ?”, et que les mathématiques répondent au “comment ?”. Ce ne sont pas que des chiffres, des calculs et des théorèmes. Je ne dirais même pas que c’est la transcription de notre logique. C’est avant tout l’art de réfléchir. Une réflexion qui peut prendre toute sorte de formes.
Quand on dit que la mathématique est la reine des sciences, le message n’est pas que ceux qui n’en font pas sont moins futés et intelligents. On veut juste dire que du raisonnement, il y en a partout. La logique est omniprésente, même si elle ne prend pas souvent la forme d’une équation. On est tous différents, et les maths le sont aussi. Les chiffres et les inconnues sont là pour nous aider à appliquer des idées qui marchent. Malgré tout, les maths sont accessibles, il faut juste vouloir le remarquer. Elles sont partout : le casse-tête que vous résolvez avec vos cousins nécessitent une certaine représentation spatiale et géométrique de l’objet dans votre tête, quand on analyse le rapport qualité/prix d’un muffin à la cafétéria et au carrefour, ce sont des principes mathématiques qu’on met en marche ! Alors, il est inutile de se mettre la pression, il faut juste trouver ce qu’on aime faire, car des maths, on en fera beaucoup plus tard, elles n’auront juste pas la même forme. Dans la géographie, dans l’histoire, dans l’écologie et dans les langues, il y a des maths, on ne les remarque juste pas, car même si parfois on dirait que cette matière crie pour se faire remarquer, elle sait se faire discrète. On met des valeurs sur des évènements du passé pour ne pas reproduire les mêmes erreurs, on observe la société pour prédire le futur, et notre vocabulaire devient la base de l’apprentissage des intelligences artificielles. Ainsi, soyez curieux et ne vous découragez pas. Les plus grands mathématiciens de l’histoire de l’humanité ne finissaient pas leurs problèmes en un temps record, et étaient rarement les premiers de leur classe de math.
Alexandra Dudka / S6FRA / EEB1 Uccle