Simon Gronowski : le miraculeux destin d’un survivant de l’Holocauste
Le jeudi 11 mai dernier, le bâtiment Van Houtte de EEB1 a accueilli un invité très spécial, le docteur Simon Gronowski. Auteur du roman historique et autobiographique L’Enfant du XXe convoi, docteur en droit, avocat au barreau bruxellois, pianiste de jazz virtuose, et survivant de l’Holocauste juif de la Seconde Guerre mondiale, Monsieur Gronowski nous a fait le récit bouleversant et mouvementé de sa vie frappée par la Shoah.
Vers l’enfer d’Auschwitz
Le docteur Gronowski est né le 12 octobre 1931 à Uccle dans une simple et heureuse famille juive d’origine polonaise. Ses parents, Léon Gronowski et Chana Kaplan, tenaient une petite boutique de sacoches dans la commune bruxelloise d’Etterbeek. Mais lorsque le petit Simon n’avait que 9 ans, le peuple belge ainsi que tant d’autres se virent accablés par l’occupation nazie en 1940. Après s’être fait confisquer ses biens et avoir été interdite de travail pour la simple raison d’être nés Juifs, la famille Gronowski s’est vue obligée de fuir pour une autre commune de Bruxelles, Woluwe. Ils eurent cependant le malheur d’être dénoncés, et en 1943, la Gestapo arrêta Simon, sa sœur Ita et sa mère Chana ; toute sa famille à l’exception de son père. Tous trois furent embarqués la nuit qui suivit pour la Caserne Dossin, à Malines. Un mois plus tard, Simon et sa mère furent à nouveau déportés, sans sa sœur car elle avait la nationalité belge ; mais cette fois pour le camp d’Auschwitz-Birkenau. C’est là qu’ont été envoyées par centaines de milliers des personnes juives, handicapées, homosexuelles, ainsi que faisant partie de bien d’autres minorités ; avec pour toute explication qu’ils allaient enfin avoir le droit de travailler. Or à l’époque, personne ne savait qu’à l’autre bout des rails se trouvait leur mort certaine.
Une évasion spectaculaire
Le 19 avril 1943, alors qu’il n’avait que 12 ans, Simon Gronowski parvint à s’échapper du 20ème convoi qui l’emmenait, lui, sa mère et plus de 1600 autres Juifs vers le terrible camp de Auschwitz. Or, alors que le train passait par une commune belge néerlandophone du nom de Boortmeerbeek, trois héros de la Résistance belge durant la Seconde Guerre mondiale (Robert Maistriau, Jan Franklemon et Youra Livchitz) parvinrent à arrêter le train et à évacuer quelques dizaines de personnes, parmi lesquelles Monsieur Gronowski lui-même. Il s’enfuit, seul, et de retour à Bruxelles, fut transféré de famille d’accueil en famille d’accueil comme enfant caché, abrité par la bonté des gens du peuple belge. Ita finit aussi par être embarquée, en septembre 1943, et pendant près de deux ans, Simon et son père espèrent encore revoir Chana et Ita, en vain. Alors qu’il n’avait que 14 ans, son père s’éteignit, et Simon demeura seul et orphelin.
Un message de tolérance très émouvant
Ayant hérité de la maison de ses parents, le docteur Gronowski parvint à y faire venir des locataires, seule source de revenu lui ayant permis de financer ses propres études de droit à l’Université libre de Bruxelles, qu’il couronna d’un doctorat en 1954. Un tel exemple de souffrance doublée de résilience a grandement ému nombre de ses auditeurs.
Monsieur Gronowski a fait son récit devant une assemblée de plus de 300 élèves de S6, sans se donner le moindre répit, et toute l’audience était pendue à ses lèvres. Nous avouant qu’il n’avait pas raconté son histoire pendant près de 60, il a fini son allocution sur une note harmonieuse d’espoir, de pardon, d’amour et de tolérance. Il nous a redonné foi en la bonté de l’humanité lorsqu’il nous a raconté comment un gendarme belge lui avait permis de retourner à Bruxelles, après sa fuite du convoi en 1943, en lui disant qu’il était du bon côté et le laisserait en liberté. Ce gendarme avait risqué sa position et sa vie en le protégeant, et c’est là un exemple flagrant de la gratitude que semble éprouver Monsieur Gronowski envers la vie et les bonnes personnes. Son optimisme, malgré les terribles épreuves qu’il a endurées, a touché jusqu’aux larmes certains élèves et professeurs, particulièrement lorsqu’il a dit « ma vie est faite de miracles, car sans miracles je ne serai pas ici ». Il nous a priés également de nous éduquer afin de ne plus produire les erreurs du passé, de prendre soin du monde, et de réaliser combien l’Europe dans laquelle nous avons le privilège de vivre est un symbole de démocratie et de paix qu’il nous faut à tout prix conserver et faire prospérer.
Marie Vasiliu-Bolnavu / S6 FRA / EB1 Uccle