Myanmar : la terreur surgit des profondeurs

28 Mars 2025, 13h20 : la catastrophe commence. Deux tremblements de terre aussi meurtriers que dévastateurs, respectivement de magnitude 7,7 et 6,4, frappent le Myanmar (ex-Birmanie), le pays aux mille pagodes, et secouent tout le sud de l’Asie. Selon l’ONU, le bilan actuel des morts s’élève à 3000, et le coût des dégâts n’est pas encore quantifiable. Que s’est-il passé, pourquoi l’évènement a-t-il été aussi catastrophique, et pourquoi l’aide humanitaire envoyée semble-t-elle entravée ?
Impact des tremblements de terre
C’est à moins de 20 km de la ville de Sagaing, au nord du Myanmar, que les épicentres des deux tremblements de terre se sont produits. Le premier, d’amplitude 7,7 sur l’échelle Richter, le plus puissant depuis plus d’un siècle dans le pays, a duré quatre longues minutes, et provoqué la plus grande partie des dégâts. Et pour les infrastructures qui avaient tenu le choc, le deuxième, d’intensité 6,4, est venu leur porter le coup de grâce. Selon plusieurs rapports, le nombre de victimes atteint les 3000, et les blessés se comptent en milliers. Malheureusement, ce bilan pourrait continuer à s’alourdir davantage. Les villes fortement touchées, telles que Mandalay, la deuxième ville du pays, et Rangoun, la capitale, sont sous les décombres et la quantité de personnes portées disparues, est alarmante. L’envergure complète des dégâts n’a pas encore pu être établie, mais la catastrophe naturelle a aggravé la situation humanitaire déjà présente.

Si c’est à proximité des épicentres que les dégâts ont été les plus importants, les impacts n’ont pas manqué de se faire sentir dans les pays voisins du Myanmar. D’intenses secousses ont été enregistrées dans toute la région, en Inde, en Chine, au Cambodge, au Bangladesh et en Thaïlande. A mille kilomètres de là, la ville de Bangkok a été victime d’importants tremblements, causant une panique générale de la population et l’effondrement d’un immeuble de 30 étages.
Pourquoi la catastrophe a-t-elle été si dévastatrice ?
L’élément le plus important est évidemment la magnitude des tremblements de terre, notamment celle du premier. Selon l’échelle de Richter, un tremblement de magnitude comprise entre 7 et 8 est considéré comme « Majeur » et capable de « destructions majeures à modérées sur une très large zone en fonction de la distance. », selon l’Institut français de Volcanologie Minéralogie. Il est tout de même important de souligner qu’il existe une distinction entre magnitude et intensité, cette dernière mesurant la façon dont un séisme est ressenti dans un endroit spécifique.

Myanmar est également un pays qui connaît une période d’instabilité politique et économique. Alors que, durant la dernière décennie, le gouvernement s’était engagé à effectuer une transition démocratique, après près d’un demi-siècle de dictature militaire, voilà que le pays en est confronté à une nouvelle. Depuis février 2021, la junte est au pouvoir et les combats avec des groupes rebelles dit « démocratiques » contraignent des milliers de civils à être déplacés. Cela, ajouté à la pauvreté considérable qui ronge le pays, et dont les conflits n’améliorent certainement la situation, explique l’ampleur gigantesque des dégâts, et la souffrance d’une population clairement mal préparée face à ce type de désastre.
Enfin, le facteur chance doit aussi être pris en compte. Myanmar a eu la malchance que ces séismes se produisent près de villes assez denses, et où la pauvreté est particulièrement accrue.
L’aide envoyée est-elle entravée ?
Le gouvernement militaire du Myanmar, situé dans la ville fantôme de Nay Pyi Taw, a lancé un appel à l’aide internationale suite au tremblement de terre. Ceci suggère la gravité des évènements car, depuis le coup d’Etat militaire en 2021, le gouvernement s’était toujours montré très distant et isolé du reste du globe. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a déjà déployé des équipes d’urgence avec quelques tonnes de fournitures médicales, fondamentales en ce moment où les hôpitaux de Mandalay et Nay Pyi Taw sont débordés. La Fédération Internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) a, quant à elle, organisé une récolte de dons et mobilisé des secouristes de tout genre. Les pays voisins, comme la Chine ou l’Inde, moins durement touchés, sont également en train de venir directement en aide au Myanmar, à travers des ressources humaines et financières. L’Union Européenne, de son côté, a annoncé envoyer une enveloppe de près de 12 millions d’euros dans les prochains jours.

A présent, une question non négligeable fait surface, et suscite de la méfiance : « Peut-on être sûr que cette aide soit utilisée correctement ? » En effet, la dictature militaire en place semble déjà avoir empêché des aides vitales d’arriver dans des zones contrôlées par des rebelles. Ces zones sont pourtant sévèrement touchées et les entraves n’envisagent absolument rien de bon pour les civils. Un doute, à l’égard de dépenses irresponsables, provoque aussi une forme d’inquiétude, mais rien ne semble encore prouver de telles actions. Finalement, comme les médias sont muselés et l’accès à l’information largement contrôlé par la junte, le cadre du désastre a des zones de flous, aussi bien pour les secouristes que pour les victimes. Un bon exemple de la répression existante de la presse dans le pays est le fait qu’il y ait plus d’images des impacts observés en Thaïlande, qu’au Myanmar, où la catastrophe a pourtant eu lieu.
Niccolò Panella / S6FRD / EEB1 Uccle